Les conditions de travail qu'impliquent la réforme du bac et en particulier les épreuves anticipées de français (EAF) posent de sérieux problèmes d'organisation pour les collègues, et impliquent de devoir jongler avec de trop nombreuses obligations en même temps.
En juin, être professeur de français, c’est ressortir officiellement son costume de super-héros ou de super-héroïne. En gros, une fois la culotte enfilée sur le collant vous aurez pour mission de finir les cours, les conseils de classe, de préparer vos interrogations orales, de corriger vos copies de bac, avec un peu de chance de participer au Grand oral ou aux corrections de BTS ou encore d’être sollicité.e pour d’autres missions top secrètes.
EAF en approche !
A partir de début juin, on n’ouvre plus son casier sans appréhension ! Les convocations vont arriver, pour sûr, mais c’est comme une boîte de chocolat, on ne sait jamais sur quoi on va tomber !
La surprise principale demeurant le lieu de convocation pour les oraux : s’il faut y être à 7h30 et qu’on a 30 minutes de trajet plus les bouchons, à quelle heure faut-il déposer les enfants sur le trottoir de l’école ?
On attend alors impatiemment les récapitulatifs des classes à interroger pour pouvoir faire son travail de préparation avec professionnalisme et honnêteté. Une légende raconte même que certain·es ont dû se battre pour les avoir et ne pas se retrouver à interroger « au talent ». Commence alors le travail de lecture et d’analyse des textes et des œuvres, la préparation des questions de grammaire et des questions de l’entretien.
Et si on se compliquait un peu la préparation des EAF ?
Cette année on n’a plus l’indication préalable sur l’œuvre choisie par chaque candidat pour l’entretien. On prépare donc les 8 œuvres intégrales par récapitulatif, et on multiplie au minimum par deux classes. Le risque de bosser pour du vent est élevé, on ne va pas se mentir… et c’est tellement motivant ! Et que personne n’argumente sur la beauté du geste gratuit et de l’étude enthousiasmante qui se suffit à elle-même : pas en juin !
Il faut d’ailleurs prévenir les élèves qui ont, dès l’an passé, développé la stratégie du choix de l’œuvre préférée pour pouvoir faire l’impasse sur les lectures linéaires afférentes. C’était risqué l’an passé, c’est dangereux cette année.
Interroger le jour, corriger la nuit !
A partir du 20 juin on peut imaginer l’arrivée des copies ! Une petite réunion d’harmonisation et c’est parti pour les 80 copies avec 4 sujets différents.
Lorsqu’arrivent les quatre jours d’interrogation orale, on laisse de côté les copies pour éviter d’interroger le jour et de corriger la nuit. Les 14 candidats quotidiens demandent une attention et une énergie de tous les instants : écouter, relancer, dialoguer, évaluer les 4 items, compléter les bordereaux.
Mieux vaut être en forme. Et tenir le choc. Et prendre sur soi. Non, vous ne serez pas le maillon faible qui mettra en difficulté vos collègues et pire, les candidat.es !
Une perspective salutaire : la mise en loge !
Une bonne nouvelle qui se profile et qui a déjà profité à certains et certaines en 2021 : la mise en loge, comme pour le Grand Oral, organisée par l’établissement, pour éviter d’interroger et de surveiller de concert. Avec ce système, finie la solitude de l’examinateur·rice face à l’organisation du passage des candidat·es ou la déambulation pour trouver des sanitaires dont on n’a finalement pas la clef… Reste à voir comment sera appliquée cette nouvelle recommandation : n’hésitez pas à nous faire des retours de vos expériences ! (complétez le formulaire en cliquant ici)
Et si c’était l’organisation de l’EAF qu’on interrogeait plutôt ?
Enfin, il convient de s’interroger sur la lourdeur systématique de ce mois de juin ! Les nombreux arrêts maladies de cette période ne sont pas le signe d’une fragilité inhérente à la discipline mais bien de conditions de travail dégradées qu’on nous impose sans améliorations, année après année.
Est-ce le calendrier qu’il faut revoir pour ne plus superposer les missions ou pour allonger les délais ?
Ne faudrait-il pas s’interroger sur la manière dont sont convoqués ou non les collègues ? D’autres académies font des choix différents de la nôtre.
Enfin il convient de s’interroger sur les collègues à temps partiel dont la quotité de travail n’est pas prise en compte pour le bac et qui se retrouvent face à un casse-tête grandeur nature !
Il est temps de se poser et de poser les bonnes questions. Faire passer le bac, oui. Quoi qu’il en coûte, non.
Les militants et militantes du Sgen-CFDT restent à votre écoute pour vous accompagner au quotidien et pour porter les revendications qui amélioreront les conditions de travail de toutes et tous ! N’hésitez pas à nous contacter !
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