Mesurer l’efficacité de l’enseignement en collège : mission impossible ?

Le dernier rapport du CNESCO portant sur les inégalités territoriales a incidemment reposé la question des finalités de l’enseignement au collège. Explication.

collègePeut-on mesurer la qualité d’un collège à partir de ses résultats au DNB ?

Pour mesurer les écarts entre collèges d’Ile de France, les auteurs du rapport se sont appuyés sur les résultats à l’examen terminal du brevet, mettant ainsi en évidence un écart de 30 points entre les collèges les plus favorisés et les collèges les moins favorisés. En cela ils étaient fidèles à la démarche du CNESCO, qui tend à privilégier les contrôles externes et le modèle académique traditionnel.

Cette donnée a été reprise par le Nouvel Observateur qui a pu titrer « Pourquoi les vrais chiffres du brevet des collèges sont inquiétants ». Il a relevé un écart de 40 points entre le taux d’obtention du diplôme et le taux de réussite à l’examen terminal et en a déduit un « redressement des notes par le contrôle continu ».
Pourtant, contrairement à ce qu’a pu écrire le Nouvel Observateur, ce ne sont pas les enseignants qui sont schizophrènes : c’est le fait d’assigner au collège des objectifs contradictoires qui aboutissent assez logiquement à des résultats qui le sont tout autant…

D’un côté le code de l’Éducation, reprenant la Loi d’orientation de 2013, fixe comme objectif au collège d’attester de la maitrise du socle commun de connaissances, de compétences et de culture par le bilan de fin de cycle 4. Il s’agit de se donner enfin un objectif pédagogique en termes de résultats (les compétences acquises par les élèves) et non seulement en termes de moyens (le nombre d’heures de cours assurées et les programmes affichés). De l’autre, le choix (ou plutôt le non-choix) a été fait de maintenir, puis de renforcer avec le nouveau ministère, un examen terminal sur le format d’un petit bac – qui comptera en 2021 plus d’épreuves que le vrai –.

La délivrance du DNB additionne donc les notes obtenues aux épreuves terminales et le bilan de fin de cycle traduit en points (et non pas les notes de contrôle continu). Tout ça pour un diplôme dont personne ne reconnaît ni l’utilité ni la légitimité…

Quel sens pour les apprentissages réalisés au collège ?

Cette absence de finalité claire pour le collège pèse sur le travail des personnels enjoints de poursuivre deux objectifs distincts et opposés : d’une part, préparer les élèves à réussir une performance unique dans des épreuves disciplinaires, et d’autre part les positionner en prenant en compte l’ensemble des compétences manifestées au cours du cycle 4.

La confusion est accentuée cette année par les évaluations de 6ème et de 2nde. Ces dernières, aux finalités incertaines, semblent déconnectées du brevet, et surprennent les enseignants de 2nde qui ne savent pas comment leur donner du sens. Le Sgen-CFDT avait pourtant, dès le début du quinquennat, demandé de chercher à donner une valeur diagnostique aux épreuves terminales du DNB pour en faire un support des pratiques pédagogiques en début de 2nde. Cela aurait redonné du sens à la liaison collège/lycée, de la valeur aux apprentissages réalisés au collège et permis de renoncer aux évaluations de 2nde, réalisées seulement 2 mois après le DNB.

L’avis du Sgen-CFDT sur l’autonomie dans la réforme du collège :

Le tract (2018) : test de positionnement en seconde, l’école de la défiance.

Faire confiance aux équipes et les engager réellement dans une évaluation des compétences ?

C’est d’une ligne claire porteuse de sens dont les équipes de collège ont besoin : pour le Sgen-CFDT, cela passe par une validation des compétences du socle pour l’ensemble d’une classe d’âge, en cohérence avec le projet initial de la Loi de Refondation de l’École. Le développement des compétences du domaine 3 du socle commun, autour de la responsabilisation des élèves et de leur éducation citoyenne, devrait d’ailleurs plus que jamais être au coeur des préoccupations dans la période actuelle.

Pour atteindre cet objectif c’est bien la relation pédagogique qui est essentielle, ce qui implique de donner des marges de manœuvre aux équipes éducatives, de faire confiance à leur expertise pédagogique et à leur professionnalisme. Celles-ci disposent en effet de la connaissance des élèves et de leur milieu, et elles sont donc les mieux à même d’élaborer collectivement les stratégies pédagogiques les plus pertinentes.

Le tract (2018) : collèges, lycées, enseigner au quotidien.

Cet enjeu de définition locale et collective des meilleures pistes pédagogiques à mettre en œuvre est bien ce qui a servi de boussole au Sgen-CFDT au moment de la réforme du collège, et cet enjeu reste plus que jamais d’actualité.