Le projet de budget 2023 prévoit des hausses de salaires pour les personnels de l’éducation nationale. Alors que le ministre répète régulièrement le chiffre d’une hausse de 10% du salaire pour les enseignant·e·s, qu’en est-il vraiment ?
Un budget en hausse
Le ministère a présenté pour l’année 2023 un budget en hausse de 3,7 milliards d’euros. C’est une hausse importante (+6,5%) pour un budget qui était, en 2022, de 53,6 milliards.
- Sur ces 3,7 milliards, une petite moitié permet de financer la hausse du point d’indice de 3,5% décidée en juillet 2022.
- 935 millions d’euros sont prévus pour les hausses de salaire des enseignant·e·s.
- 140 millions d’euros sont prévus pour les personnels non enseignants.
- Sur les 935 millions d’euros prévus pour les enseignant·e·s, 635 millions d’euros sont prévus pour des hausses de salaires « inconditionnelles ».
- Ces hausses ne seraient versées qu’à partir de septembre 2023. Ainsi elles représenteraient près de 2 milliards d’euros en année pleine.
Vous suivez toujours ?
A première vue, voici donc un effort budgétaire considérable et il faut remonter loin, très loin dans le temps pour constater de telles augmentations. C’est aussi une conséquence de l’action syndicale depuis plusieurs années sur ce dossier.
Toutefois, quand on y regarde de plus près, cela se complique…
Une hausse pour tou·te·s ?
Sur ce sujet, le ministre a été clair : ces hausses « inconditionnelles » ne seront pas réparties de manière uniforme entre tous les personnels. L’objectif est de privilégier les débuts de carrière et, éventuellement, les milieux de carrière, même si le ministre semble peiner à les situer.
Pour le Sgen-CFDT, il peut être légitime de chercher à mieux répartir l’argent versé tout au long de la carrière ou entre les différentes catégories pour arriver à une rémunération plus juste. Toutefois il est indispensable :
- de conserver une réelle progressivité dans la carrière : il ne saurait être question que des personnels en début de carrière soient mieux payés que des personnels qui ont déjà des années d’ancienneté (rassurons-nous, ce n’est pas prévu)
- d’avoir une attention toute particulière pour les personnels en milieu de carrière. Alors que les rémunérations peinent beaucoup à décoller et que certains de ces personnels ont déjà été les oubliés de PPCR ou des hausses (relatives) des dernières années du ministère Blanquer, il est indispensable de revaloriser réellement les rémunérations de ces personnels.
10%, vraiment ?
Depuis plusieurs mois, le ministre rappelle ce chiffre, issu de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron : 10% de hausse de salaires pour les enseignant·e·s. Malheureusement, il y a dans tout ceci une belle entourloupe. Quand on y regarde de plus près, on se rend compte que le ministre aurait pu se reconvertir dans la vente d’assurances ou de crédits à la consommation : il faut lire attentivement les petits caractères.
En effet ces « 10% » incluent :
- Les hausses déjà effectuées durant les dernières années Blanquer.
- Les 3,5% de hausse du point d’indice décidés en juillet.
Autrement dit, une partie de cette hausse a déjà été versée et ne permettra pas de rattraper les différences de salaires entre les enseignant·e·s et les autres personnels de la fonction publique.
Surtout, cette hausse se fait dans un contexte d’inflation galopante qui vient sérieusement réduire son impact. L’INSEE estime en effet que l’inflation pour l’année 2022 sera de 5,2%. C’est autant en moins pour le pouvoir d’achat des personnels.
Solde de tout compte ?
S’il y a donc bien un effort budgétaire important réalisé sur 2023, qu’il ne faut pas nier, celui-ci est loin de permettre réellement 10% d’augmentation des personnels et est loin de régler la question salariale dans l’Éducation Nationale.
En effet le retard accumulé ces 40 dernières années dans les rémunérations des personnels de l’Éducation Nationale est bien plus important, de l’ordre de 20 à 30%.
Ainsi, cette hausse de 2023 ne peut constituer qu’une marche de revalorisation supplémentaire et pas un solde de tout compte. Pour espérer rattraper le retard accumulé, il faudra bien davantage ! C’est pourquoi le Sgen-CFDT demande depuis plusieurs années une loi de programmation pluriannuelle qui permettrait de garantir un processus réel de revalorisation important sur plusieurs années.
Un drôle de « pacte »…
Enfin, parmi les hausses prévues en 2023, 300 millions correspondraient au « pacte » promis lors de sa campagne présidentielle par le président Macron aux enseignant·e·s : une rémunération supplémentaire pour des missions supplémentaires. A ce stade, le plus grand flou demeure sur le contenu de ces missions. Le Sgen-CFDT rappelle :
- Qu’il est opposé, aujourd’hui comme hier, à une rémunération au mérite.
- Que les missions des personnels ont déjà augmenté. Le Sgen-CFDT revendique une indemnité de responsabilité augmentée (IRA) pour l’ensemble des personnels.
- Qu’une rémunération supplémentaire liée à des missions supplémentaires ne constitue pas une revalorisation.
Le Sgen-CFDT va continuer à porter et défendre, par tous les moyens nécessaires, ses revendications pour de meilleures rémunérations de l’ensemble des personnels !