« Je suis épuisée de dire qu’on va droit dans le mur !»

La CFDT-EFRP a lancé la première partie de son questionnaire. Ciblé sur les personnels dans les établissements, vous avez été 34 à répondre au questionnaire. Le temps est venu de restituer vos réponses!

Notre questionnaire sur le logiciel OPALE nous avait déjà fortement renseignés sur le mal être des collègues administratifs. C’est malheureusement sans surprise que ce nouveau questionnaire confirme ce que nous savions déjà. Un constat alarmant, tant le (re-)sentiment de faire face à toujours plus de difficultés est inversement proportionnel à la richesse des métiers administratifs. Car ne l’oublions pas, les administratifs sont souvent perçus comme la cinquième roue du carrosse, voire la variable d’ajustement, qui se traduit de facto par une sous dotation en postes dans les services. Pourtant, ce sont des métiers qui font vivre les établissements, les entretiennent et concourent pleinement à la réussite des élèves.

Un sentiment d’abandon généralisé

Les secrétaires administratifs sont une majorité à avoir répondu (47%), suivi par les adjoints administratifs (26%). Ce n’est pas un hasard, puisque la plupart des poste en EPLE est occupée par des catégories B et C. Néanmoins les catégories A ont été 27 % à donner leur avis (tout grade confondu), ce qui témoigne de la porosité du sentiment d’abandon au sein des trois catégories. Il ne faut pas oublier que les chefs de service (A et B) sont en première ligne, puisqu’ils ont en charge l’organisation de leur service.

Etant orienté vers les EPLE, la majorité des réponses sont le fait de secrétaires généraux (35%) et de secrétaires de gestion (21%). Mécaniquement les agences comptables sont sous-représentées, ce qui est normal puisque numériquement moins nombreuses, avec 24 % de réponses, quelque soit le métier (fondé de pouvoir, secrétaire de comptabilité et agent comptable). Par ailleurs, les 40/50ans et les 50/60ans sont les plus représentés avec respectivement 35 % et 32 %. Les trentenaires ont répondu à 26 %. Ce sont donc souvent des personnels en poste depuis plusieurs années. Peu font fonction (à peine 6%), ce qui montrerait à priori une relative stabilité.

En ce qui concerne l’utilisation des logiciels financiers (GFC et OPALE), il est intéressant de voir que 41 % des personnels utilisent encore les deux. En revanche 38 % n’ont pas encore été formés au progiciel, seule une majorité relative l’a été (44%).

L’organisation du poste de travail semble plutôt respectée puisque 76 % des sondés ont une fiche de poste et que 62 % ont un temps de travail défini. En revanche, 68 % sont contraints de faire des heures supplémentaires et 75 % se sentent dépassés et/ou fatigués, ce qui est plus inquiétant. L’immense majorité semble pouvoir récupérer, pour autant est-il normal de devoir travailler plus pour accomplir ses tâches de travail ? D’après le retour des personnels, les grands absents sont les chefs de service: l’agent comptable et/ou le secrétaire général. Mécaniquement cela se traduit par une surcharge de travail pour les secrétaires de comptabilité et de gestion ; et inversement pour un chef de service, lorsqu’un.e secrétaire est absent.e.

Néanmoins les chef.fes d’établissement semblent massivement jouer le jeu en faisant des demandes de remplacement (79%) ou de complément (91%). A contrario, l’institution complète, à une courte majorité, les temps partiels pour retraite (56%). Sans grande surprise le télétravail n’est pas la règle, soit parce que techniquement c’est impossible, soit parce que la hiérarchie le refuse.

De la surcharge de travail au mal être au travail

Dans ces conditions, comment analyser cette surcharge de travail ? Outre l’absence d’un personnel administratif, les décisions de la Collectivité peuvent avoir une incidence sur la surcharge de travail. Ainsi pour un agent de maintenance absent, c’est le secrétaire général qui doit gérer toutes les demandes, suivre les travaux et intervenir dans le bâtiment durant les vacances. Il en résulte d’ailleurs des situations ubuesques où des personnels travaillent avec leur veste parce que la collectivité refuse d’allumer le chauffage.

Par ailleurs, les non remplacements (postes non pourvus ou temps partiel non complétés) induisent souvent l’occupation de deux postes pour un seul agent, ce qui devient rapidement très compliqué à gérer. On constatera également que les évolutions réglementaires ou autres sont souvent source de travail supplémentaire, du moins lors de leur mise en application la première année, telle que celle des bourses de collège.

Ce questionnaire a également mis en lumière le mal être des collègues. Si la hiérarchie directe, c’est-à-dire les chef.fes d’établissement, font les démarches pour remplacer les personnels absents, ce n’est pas le cas du Rectorat. Par exemple, ce témoignage d’une secrétaire de gestion : « je suis à mi temps thérapeutique (50%) et le rectorat a refusé de compléter mon poste. La gestionnaire était à 80% (elle est repassée à temps plein étant donné qu’elle comblait pour assurer le service), la secrétaire de direction est aussi à 80% et le Rectorat a également refusé de combler le manque alors que les années précédentes c’était fait. ».

Par ailleurs, le travail se fait toujours dans l’urgence. Il n’y a rien d’étonnant puisqu’on empile les changements ( OPALE, bourses, etc. ) mais pas les remplacements. Il est intéressant de noter que ce mal-être ne se limite donc pas au nouveau progiciel OPALE, déjà source évidente de dysfonctionnement et de difficultés. Nombreux sont ceux qui parlent d’épuisement, de ne plus tenir et d’être au bord du burn out.

Le risque psychosocial est donc bien là : car en plus de supporter toujours plus de tâches, il faut gérer le mécontentement du public (élèves et familles). Les secrétaires généraux aguerris semblent également en proie au doute : « Opale est très peu ergonomique, peu intuitif, ajout de tâches fastidieuses et de clics surnuméraires. Bref Opale est très chronophage et a doublé ma charge de travail déjà conséquente dans un gros collège. Beaucoup de retards accumulés pas seulement dans opale » ou encore « Je me sens dépassée et épuisée, car le travail s’accumule, de fait prend du retard, et que la qualité du travail fait n’est pas optimale et à la hauteur de ce qui est attendu dans une agence comptable. En conséquence je me pose beaucoup de questions, ai-je les compétences nécessaires pour ces missions ? »

Ce qui ressort de ce questionnaire, ce n’est pas que les personnels ne veulent pas accomplir leurs tâches, c’est qu’ils ne peuvent pas ou plus le faire. Alors, comme le dit parfaitement une collègue : « on comble les vides ! »