Le gouvernement a annoncé un « plan filles et maths » visant à inciter les filles à se former aux sciences de l’ingénieur et du numérique. Il comprend des objectifs cibles, des incantations et une injonction de formation impossibles à mettre en œuvre sérieusement faute de moyens.
Les objectifs annoncés sont la réduction des biais de genre des enseignants, la lutte contre l’autocensure des élèves, les stéréotypes et les inégalités qui freinent encore trop souvent les parcours scientifiques des jeunes filles.
La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques partage les objectifs affichés par le « plan filles et maths ». Malheureusement, il n’y a aucune chance qu’ils soient atteints avec les seules mesures de ce plan.
Pour la CFDT, l’égalité entre filles et garçons à l’école ne se décrète pas. Elle se construit, au quotidien, avec des personnels formés, reconnus, et dotés de moyens pour agir.
Sensibilisation obligatoire de 2h au biais de genre de tous les personnels avant le 15 septembre…
Le plan « filles et maths » prévoit que cette sensibilisation sera assurée par les directeur⋅trices, les chef⋅fes d’établissement ou les référent⋅es égalité filles-garçons qui auront eux-mêmes bénéficié d’une formation.
Dans la réalité, côté premier degré, les directeurs et les directrices ont reçu l’injonction de prévoir un moment lors d’un conseil des maitres ou lors de la journée de solidarité ou encore lors d’une demi-journée prévue à l’initiative du DASEN. Par contre, pour la formation préalable à ce temps, à part une vague information en réunion de rentrée, rien. Ah, si ! Elles et ils ont reçu un diaporama à diffuser…
Côté second degré, les chef⋅fes d’établissement ont, pour la plupart, repoussé le traitement de cette demande à plus tard. Cette flexibilité temporelle a été confirmée par la ministre elle-même auprès de nos représentants cette semaine.
Oui, le sujet est important, mais ce n’est pas avec ce genre de temps à la va-vite et sous la contrainte que l’on peut espérer changer les pratiques professionnelles. D’autant plus qu’en ce début du mois de septembre, les équipes pédagogiques ont bien d’autres priorités.
… et un plan de formation « filles et maths » pluriannuel
Le plan « filles et maths » prévoit, dès cette rentrée, une formation d’au moins une journée, pour tous les professeurs des écoles, de mathématiques de collège et de lycée général et technologique, pour prévenir les biais de genre et les stéréotypes dans l’enseignement des mathématiques.
On ne voit pas trop comment cette demande pourrait se réaliser, vu l’état de la formation continue, les contraintes de formation hors temps élèves et les obligations de formation en maths et français dans le premier degré. Cette injonction supplémentaire de formation, sans les moyens suffisants, va mettre en tension tous les personnels pour trouver des solutions, que ce soit les personnels d’encadrements, les formateurs et les enseignants. Comme trop souvent, un plan décidé sans concertation qui sert la communication ministérielle et l’intendance suivra !
Pour la CFDT, une formation est essentielle sur ce sujet. Elle doit concerner tous les adultes des écoles et des établissements. Le ministère doit y mettre les moyens nécessaires. Des actions doivent aussi être prévues en direction des parents qui ont un poids très important dans les biais de genre.
L’évolution des pratiques professionnelles nécessite, en plus de la formation, des temps d’échanges de pratiques professionnelles, des possibilités d’observations croisées dans les classes.
Classe à horaires aménagés, objectifs cibles et orientation
Le plan « filles et maths » prévoit d’autres mesures ponctuelles, pour la plupart incantatoires et qui ne font pas une politique publique.
Ce n’est pas en demandant l’augmentation de 30 000 filles dans les spécialités mathématiques que la réalité va évoluer. Il faut s’interroger sur les causes. La réforme du bac Blanquer, en omettant les mathématiques dans le tronc commun, a considérablement réduit le nombre d’élèves et particulièrement de filles ayant des mathématiques dans leur cursus. Depuis, le ministère essaie de corriger cette erreur par sparadraps successifs : ajout d’heures dans le tronc commun, création d’une épreuve anticipée de mathématiques en première, modification des programmes.
La CFDT continue de demander l’ouverture d’une concertation pour remettre à plat l’ensemble de l’enseignement des mathématiques et des sciences au lycée.
La proposition d’expérimenter des classes à horaires aménagés en mathématiques et sciences (Chams) est intéressante. Il faudra en faire le bilan pour définir son intérêt réel et les conditions de sa réussite avant toute généralisation.
Les professeurs principaux de 3ᵉ et les psychologues de l’éducation nationale doivent avoir une attention particulière portée aux filles dans l’accompagnement à l’orientation.
Nous continuerons à revendiquer une politique éducative cohérente qui donne à toutes et tous, filles comme garçons, les moyens de réussir dans toutes les disciplines, y compris les mathématiques.