En ce mois de mai, nous arrivons, pour les établissements de la 1ère vague, à la fin de la 2ème année en lycée 4.0. En tout, ce sont 27 lycées alsaciens qui sont dans le dispositif et la généralisation,
qui était tout d’abord annoncée comme progressive, va connaître une accélération brutale.
Quel bilan pouvons-nous dresser aujourd’hui de le mise en place du lycée 4.0 ? Que nous disent les collègues lors des heures d’information syndicale que nous menons dans les établissements sur ce sujet ?
Un équipement préalable… ou pas…
S’il est vrai que les élèves peuvent arriver équipés à la rentrée, la réalité de ces deux premières années prouve qu’il ne faut pas s’y attendre avant, au moins, les vacances de la Toussaint, pour les divisions qui en sont à leur entrée dans le dispositif (donc, chaque année pour les classes de 2ndes). Les classes qui connaissent leur deuxième rentrée en 4.0. sont bien plus rapidement en ordre de marche.
La confusion entre ce qui est du ressort de la Région et de l’Éducation nationale est courante : le professeur et l’établissement sont interpellés par les familles et les élèves au sujet de la commande du matériel alors qu’ils n’interviennent pas dans le processus puisque tout cela est géré par la Région Grand Est. La démarche est complexe et connaît des ratés. Les établissements de la première vague ont essuyé les plâtres et les travaux dans les établissements n’ont pas toujours été satisfaisants, de même que les connexions et la qualité des bandes passantes. La situation s’est considérablement améliorée. L’année prochaine, la situation sera différente puisque chaque élève recevra gratuitement un ordinateur, mais des doutes sont légitimes quant à la capacité de la Région de mener à bien la distribution de tant d’équipement rapidement.
Les élèves sont priés de venir avec leurs terminaux chargés, ce qui suffit souvent pour la journée car non, les élèves ne passent pas l’intégralité de leur emploi du temps devant leur écran. Il leur est cependant demandé de ne pas utiliser la bande passante pour un usage non pédagogique : pas de jeux en ligne lors des heures libres… on peut toujours demander mais de là à ce que soit suivi d’effet… ! Des espaces avec des prises électriques sont aménagés selon les établissements mais ce n’est pas encore suffisant partout. L’équipement massif des élèves fait également entrer dans l’établissement la problématique de l’entretien et du dépannage du matériel. Si des solutions d’entraide ont pu voir le jour ici et là, il faut reconnaître que dans ce domaine on est plutôt dans un bricolage que dans une solution professionnelle. A quand des personnels informatiques dans les lycées ?
Un renouvellement des pratiques pédagogiques… ou pas…
La question de la gestion de classe est reposée et il s’agit d’un sujet souvent abordé par les professeurs que nous avons rencontrés. Il est vrai que l’introduction du numérique en classe, en ouvrant le champ des possibles, réinterroge aussi notre manière d’enseigner et nous ne voudrions pas jouer les apprentis sorciers avec les élèves qui nous sont confiés.
Le Sgen-CFDT pense que l’école ne peut pas rester à l’écart de l’évolution de la société et de la vie professionnelle :
nous devons permettre aux élèves de se saisir avec aisance des outils numériques et ne pas considérer que cela se fera tout seul, ou plus tard. Mais alors quelles activités en classe ? Et quelles nouvelles activités ? Car l’introduction du numérique ne signifie pas le changement radical des pratiques. Les professeurs choisissent leurs modalités de cours, avec ou sans l’outil numérique. Il y a un nouvel outil, dont on peut se saisir, un peu à l’occasion, beaucoup ou pas. C’est bien le professeur qui décide de l’intérêt pédagogique de l’outil et de ce que cela peut apporter pour faire travailler et apprendre chaque élève.
Le manuel numérique : vers la fin d’un modèle ?
La généralisation des terminaux numériques pour les élèves induit la disparition des manuels papiers. Si les parents peuvent se réjouir du fait que leur enfant soit équipé numériquement et qu’il n’ait plus un sac lourd de manuels sur le dos, on ne peut pas dire que l’alternative numérique soit une franche réussite.
- L’utilisation est assez disparate selon les matières et les collègues.
- L’attribution des licences est un travail de gestion assez lourd et peu flexible, qui revient souvent aux professeurs documentalistes.
- Les éditeurs ne fournissent pas tous des versions numériques qui apportent un vrai plus et des lourdeurs demeurent pour télécharger les manuels pour y voir accès hors ligne.
On peut s’interroger sur la pérennité de ce modèle de « manuel scolaire » et il y aurait bien des choses à imaginer pour transformer la question des ressources. Les collègues qui utilisaient des fichiers-élèves, complétés au fur et à mesure de l’année, ne trouvent pas d’offre valable en numérique et, particulièrement dans la voie professionnelle, doivent donc compenser par « Les collègues qui utilisaient des fichiers-élèves, complétés au fur et à mesure de l’année, ne trouvent pas d’offre valable en numérique et, particulièrement dans la voie professionnelle, doivent donc compenser par des bricolages ce qui fonctionnait bien avant. La question de la conservation des données et fiches de cours sur les 3 ans du bac pro pose également question : comment construire une progression pour l’élève s’il ne peut pas conserver et avoir accès à ce qui a été fait les années précédentes car la licence ne dure qu’un an ? On a aussi vu des collègues qui se sont passés des manuels et qui ont, grâce à Moodle notamment, fabriqué leurs supports et plateformes de travail. »
Quel accompagnement ? Quelle formation ?
Formation et accompagnement des personnels
Si le passage au lycée 4.0. a permis aux collègues de réinterroger leurs pratiques, il faut cependant également accepter que chacun doit pouvoir aller à son rythme et que la confiance et la conviction se construisent et ne se décrètent pas. Les réactions de méfiance des collègues sont légitimes lorsqu’on leur impose le passage au numérique, comme une évidence, et sans consultation. Bien des
inquiétudes ont été levées dans les établissements où les collègues ont pu bénéficier de temps de réflexion et de présentation du dispositif. Plus largement, c’est l’accompagnement et le temps donné qui feront la différence. La réforme des lycées et les nouveaux programmes doivent pouvoir être l’occasion d’intégrer le numérique dans les propositions pédagogiques. On remarque également selon les établissements et les disciplines des initiatives de travail collaboratif, des équipes qui s’organisent pour mutualiser les documents et les mises en œuvre numériques.
Equipement des personnels
Les collègues s’interrogent également sur la question de l’équipement : si craies et feutres sont distribués dans les établissements, est-il normal que ce soit aux personnels de s’équiper d’un ordinateur pour accompagner leurs élèves ? quelle compensation financière notre employeur envisage-t-il ? Le Sgen-CFDT a écrit en ce sens à la rectrice afin d’obtenir pour chacun le matériel équivalent à celui des élèves. D’autres solutions peuvent être discutées mais le sujet doit être abordé !
Comme toute mutation d’ampleur de nos pratiques, le passage au 4.0 génère un surcroît de travail qu’il faut faire reconnaître et accompagner !
Dans les établissements
Cette demande du Sgen-CFDT Alsace rencontre les attentes des collègues, qu’ils soient déjà dans le dispositif ou qu’ils y entrent en septembre. Dans certains établissements, les collègues ont sollicité directement la rectrice afin d’être équipé∙es, formé∙es et accompagné∙es pour pouvoir utiliser au mieux le numérique. La pérennité de l’accompagnement ne doit pas être oublié pour laisser aux personnels le temps d’entrer sereinement et progressivement dans le dispositif.
- Le lycée Blaise Pascal de Colmar a envoyé un courrier signé par de nombreux
collègues : courrier_rectrice blaise pascal
– Le lycée Louis Armand de Mulhouse a rédigé un texte lu au CA et remonté au
rectorat. Il a été unanimement soutenu par les 3 fédérations de parents d’élèves :courrier_rectrice4.0 lycée Louis Armand 20 juin 19Nous vous encourageons à reprendre ces courriers et à les adapter à vos lycées afin de peser dans les négociations.
Contactez-nous et tenez-nous informé∙es de vos démarches.
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