Bilan de rentrée, port du masque, dégradation des conditions de travail : le rectorat « comprend » mais n’agit pas…

Nos militant.e.s ont rencontré la rectrice de l'Académie de Strasbourg ce mercredi 7 octobre ; devant les inquiétudes et la grosse fatigue que génère la crise sanitaire chez les personnels, les réponses ont pour le moins été générales et peu concrètes... Manque de marge de manœuvre ? De moyens ?

Bilan de rentrée 2020 avec la rectrice de l’Académie de Strasbourg

Pour les résultats de notre enquête, voir d’abord :« Port du masque et conditions de travail des enseignants » : résultats de notre enquête

Madame la rectrice, Elisabeth Laporte, a exprimé à plusieurs reprises sa compréhension face aux difficultés rencontrées par les personnels en cette période de crise sanitaire et renouvelé ses remerciements pour une rentrée qui s’est relativement bien passée selon elle, « grâce à l’investissement de chacun.e » ; un bilan de rentrée positif en somme selon elle. Nous sommes cependant restés sur notre faim car peu de réponses concrètes ont été apportées, alors que la santé de nombreux personnels semble se dégrader, selon la médecine de prévention elle-même…

Quelle réponse à la grande fatigue des personnels ?

bilan de rentrée 2020Les enseignements de notre enquête « port du masque et conditions de travail »

Nous avons présenté rapidement les principaux enseignements de notre enquête (à voir sur cette page), en insistant particulièrement :

  • sur les inquiétudes liées à la qualité des masques, à leur quantité (prochaine livraison), à la prise en compte des personnels vulnérables
  • sur la dégradation des conditions de travail liée notamment – mais pas seulement – au port du masque obligatoire
  • sur la fatigue et les problèmes de santé que le port du masque provoque
  • sur l’angoisse des enseignants par rapport à une relation pédagogique qui s’est grandement détériorée – particulièrement pour les enseignants de maternelle, de CP et de langues vivantes.

Voir les résultats de l’enquête dans leur intégralité…

La rectrice comprend mais dit ne pas pouvoir agir

Pour la rectrice, tout cela est une vraie question de fond par rapport au contexte sanitaire : elle comprend cette angoisse, liée d’une manière plus globale à la transformation de la relation à autrui : « on peut imaginer que la communication non verbale et le lien entre élève et enseignant sont modifiés » ;

Malgré plusieurs encouragements à faire preuve du désormais fameux « bon sens » quant au port du masque, la rectrice n’a pas voulu ou pas pu s’engager à écrire quoi que ce soit sur d’éventuels aménagements. Elle reconnaît la dégradation des conditions de travail mais n’a pas de solution à proposer ou à envisager : « il faut appliquer le cadre réglementaire », cadre qu’elle a rappelé à tous les personnels dans son courrier de rentrée.

Sur les masques inclusifs

▶️ Une commande de masques inclusifs – c’est à dire transparents – a été faite par le ministère et devrait arriver bientôt à destination des classes comprenant des professeurs et/ou des élèves malentendants, puis des enseignants de maternelle et peut-être de CP et de langues vivantes.

Sur les masques pour personnes vulnérables

▶️ Selon le secrétaire général, il faut impérativement que les personnels fassent remonter les besoins en masques chirurgicaux à leur chef d’établissement ou IEN ; des stocks sont en effet disponibles au rectorat et peuvent être acheminés sur demande dans les établissements.

Sur la prochaine livraison de masques

▶️ Elle est en cours pour un réassort des masques en tissu dans les écoles et les établissements. Une nouvelle commande est aussi prévue pour une livraison d’ici les vacances d’hiver. Si des personnels sont en manque de masques d’ici là, il faut le faire remonter via le chef d’établissement ou l’IEN.

bilan de rentrée 2020
Enquête du Sgen-CFDT Alsace, effectuée auprès d’un millier d’enseignants

Bilan de rentrée : que dire des effectifs ?

Inquiétude sur les baisses d’effectifs dans les écoles publiques

D’après la rectrice, le bilan de rentrée montre une baisse des effectifs dans les écoles publiques beaucoup plus importante que prévue : mille enfants manqueraient à l’appel dans l’Académie de Strasbourg. Sur ces mille, environ 400 auraient rejoint des écoles privées (surtout hors contrat !) mais la majorité serait restée dans les familles. Des études sont en cours pour évaluer les causes de ce qui peut apparaître comme un discrédit de l’Éducation Nationale : effet du confinement ? de la crise économique ? d’un individualisme rampant ? Il est encore trop tôt pour le dire mais cela inquiète la rectrice, qui semble accueillir d’un bon œil les annonces du président de la République sur la fin de l’instruction à domicile.

bilan de rentrée 2020Peu de réponses face aux moyens qui diminuent dans le second degré

Le Sgen-CFDT Alsace a répété à plusieurs reprises que, dans les collèges et les lycées, les effectifs avaient augmenté alors que les moyens diminuaient dans le même temps. Dans de nombreux lycées notamment, certains groupes classes ou de spécialité sont surchargés, l’offre de formation est revue à la baisse, les heures de marge servent à financer les cours de base et non, comme c’est prévu dans les textes, à proposer de l’accompagnement personnalisé et de l’aide à l’orientation… Nous avons enfin fait remonter que les enveloppes exceptionnelles d’HSE qui ont été proposées aux collèges (pour « devoir faits ») et aux lycées sont arrivées trop tard et ne seront sans doute pas utilisées, pour une bonne partie, à cause de problèmes d’emplois du temps.

Pour la rectrice, la situation est très variable selon les lycées et dépend en bonne partie des choix faits par les perdirs et les conseils d’administration de dédoubler ou non les groupes. Elle propose que des élèves soient sortis des groupes classes lorsqu’ils ne peuvent pas suivre, pour travailler avec un autre professeur.

Une inclusion nécessaire mais rendue difficile par sa non prise en compte dans les effectifs

Nous avons une nouvelle fois interpelé l’administration sur la non prise en compte des élèves issus des ULIS, Segpa et Upe2a dans les effectifs des écoles et des collèges, alors que celle-ci est prévue par les textes ; nous avons insisté sur la grande souffrance de certains personnels de ne pouvoir les accueillir dans de bonnes conditions, notamment à cause de classes surchargées, mais aussi du manque de personnels et de la quasi absence de formation.

Notre représentant des personnels de direction a fait la proposition suivante : pourquoi ne pas inverser la logique et comptabiliser directement ces élèves dans les classes, en les intégrant a posteriori dans les classes spécialisées (au lieu de les mettre d’abord dans les classes spécialisées, puis de les « inclure » dans les classes).

La rectrice a répondu qu’on y viendrait sans doute, mais que cela n’était pas possible actuellement par manque de moyens : « on essaie de bien faire au début, en prévoyant des classes moins chargées dans les écoles et les établissements accueillant des dispositifs inclusifs » mais face à la demande, on est obligé d’attribuer quand même peu à peu les places réservées pour l’inclusion ; « pour mettre en place votre proposition, il faudrait compter les élèves deux fois, et ça, selon le ministère, ce n’est pas possible« .

bilan de rentrée

Évaluation des établissements : comment ça va se passer ?

Conformément aux décisions ministérielles (voir ici), 20% des collèges et lycées devront être évalués cette année – mais uniquement des EPLE pour cette année scolaire ; la rectrice a insisté pour que cette évaluation soit comprise comme servant « à donner de la valeur » et non comme un outil visant à classer ou à « punir » les établissements ou leurs personnels. Concrètement, plusieurs éléments importants nous ont été communiqués :

53 établissements concernés en 2020/2021, la plupart sur la base du volontariat (des chefs d’établissement).

Une grande partie se fera en auto-évaluation.

L’établissement évalué pourra récuser un ou plusieurs évaluateurs.

L’évaluation externe se fera par une équipe composée à la fois d’inspecteurs, de chefs d’établissement et d’enseignants.

La rectrice a reconnu qu’il faudrait que du temps soit libéré pour que cette évaluation se fasse dans de bonnes conditions et que cela nécessitait un changement culturel important (auto-évaluation, regard positif les uns sur les autres, changement des relations entre la hiérarchie et les personnels de terrain…) : « il faut que cela permette de faire progresser les établissements et leurs équipes. »

 

Aller plus loin

« Port du masque et conditions de travail des enseignants » : résultats de notre enquête

Le rapport d’enquête en PDF

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